“Graham & Amanda ”

Staten Island. C’est sans doute l’endroit de New-York dans lequel elle ne met jamais les pieds. Quoiqu’elle évite aussi les bobos de Manhattan depuis quelques années déjà. Elle ne sait même pas pourquoi elle a accepté ce lieu de rendez-vous choisi par un homme qui a visiblement trop vu de films sur la mafia. Elle sait que l’endroit est connu comme la cité dortoir des plus grands gangsters. Mais, là, tout de suite, elle trouve vraiment que c’est ridicule. Elle apprécie l’isolement lorsqu’elle a besoin d’anonymat, mais là en l’occurrence, il ne s’agit que de quelques grammes de cocaïne fournis par un petit dealer des quartiers mal famés. Elle a obtempéré, toutefois. Heureusement, l’échange se fait rapidement. Il ne tente plus de la séduire depuis un moment, alors ils se disent deux ou trois mots seulement avant que chacun ne reparte de son côté. Tout ça pour ça. Il est loin le temps de la Cosa Nostra. Mais qu’importe, elle a sa drogue. Elle repart, l’esprit plus tranquille qu’elle n’est arrivée. Elle roule sur quelques kilomètres, son esprit se vide peu à peu. Mais elle entend subitement un bruit bizarre avant que la voiture ne s’immobilise d’un coup. Bordel. C’est bien sa chance, ça. Elle soupire et tente de la redémarrer. Plusieurs fois. En vain. Elle sort de sa voiture, déjà agacée. Elle ne va pas faire semblant de s’y connaitre. Son regard se tourne vers les environs. Il n’y a rien à perte de vue. Et elle est trop loin pour marcher, surtout avec les talons qu’elle a aux pieds. Elle saisit donc finalement son téléphone portable dans son sac à main et cherche quelques instants le numéro d’un dépanneur. Elle appelle sur le premier qu’elle trouve, patiente quelques secondes avant d’expliquer le motif de son appel. Une heure d’attente. Elle a envie de l’incendier sur place, mais elle se retient. Ces petits cons feraient exprès de mettre encore plus longtemps. Une fois sa conversation terminée, elle range son mobile et se saisit de son paquet de cigarettes. Elle ne songe pas une seule seconde aux consignes habituelles de sécurité dont elle n’a clairement rien à faire. Elle n’a même pas de triangle, d’ailleurs. Elle en est à sa cinquième clope lorsqu’enfin, elle voit un camion arriver au loin. Ce n’est pas trop tôt. Adossée contre sa voiture, elle ne bouge pas et se contente de tirer une nouvelle taffe en l’attendant.

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“Graham & Amanda ”

Elle ne le reconnait pas tout de suite. Elle ne daigne pas le regarder alors qu’il gare son camion. Toujours occupée à se détruire les poumons, elle réfléchit quelque peu. Elle espère tout de même qu’il va pouvoir régler le problème sur place pour qu’elle puisse reprendre tranquillement sa route. Alors qu’il sort de son véhicule, elle lève enfin ses yeux charbonneux vers lui. Et c’est alors qu’elle prend conscience qu’il s’agit de… Lui. Son ange déchu dont elle ne sait rien. En fait, elle vient d’apprendre sa première information sur lui, il est mécanicien. L’ironie de la situation est plutôt drôle mais il faut dire qu’elle n’est pas facile du tout à amuser. A vrai dire, en le voyant, elle ne montre aucune réaction. Même si, à l’intérieur d’elle, c’est très différent. Elle ne l’a pas oublié, elle non plus. Elle se souvient du dernier moment qu’ils ont partagé. Il l’a enflammée sur place cette nuit-là… Et paradoxalement, elle est bien plus froide en cette journée. C’est d’ailleurs la première fois qu’ils se voient alors que le soleil est encore levé, la première fois qu’ils se voient dans un contexte… Normal. Contrairement à elle, il semble plutôt amusé, même très amusé. Mais Amanda, ça fait plus d’une heure qu’elle l’attend. Alors forcément, son humeur n’est pas au top. Et à ses paroles, elle se sent légèrement… Frustrée. Elle n’aime pas réclamer l’aide de son entourage. Elle ne le fait jamais. Ce n’est pas pour rien qu’elle a viré tous ses proches de sa vie au moment où elle allait le plus mal. Alors elle n’apprécie pas vraiment que ce soit lui qui lui porte secours. Il a beau l’appeler princesse, elle n’a rien d’une demoiselle en détresse. Enfin… D’habitude. Sans lui répondre, elle commente, comme s’ils ne se connaissent pas. – Faut pas être pressée surtout. Elle mériterait des claques, parfois. Mais elle a toujours le visage impassible alors qu’elle tapote légèrement du doigt sur sa clope pour faire tomber les cendres. Elle tire ensuite une nouvelle taffe et se redresse de sa voiture sur laquelle elle s’était adossée. – J’espère au moins que tu as apporté ce qu’il faut.

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Il laisse un sourire apparaître sur son visage là où la plupart des gens se seraient sans doute offusqués de sa réaction. Il semble si simple, si agréable, si différent d’elle. C’est assez difficile à comprendre pour une femme comme Amanda, habituée à tout autre chose. Mais elle ne cherche pas plus loin, pas encore. Elle le suit du regard alors qu’il part examiner le capot de sa voiture. Elle ne bouge pas, terminant simplement sa cigarette. Et au bout de quelques secondes, elle l’entend lui annoncer la mauvaise nouvelle. Elle ferme douloureusement les yeux, quelque peu irritée de perdre encore plus de temps. Mais elle se passe de commentaire. Elle veut juste en finir. Alors elle laisse tomber sa clope au sol et le suit jusqu’à son camion. Une fois sa voiture installée, elle part s’asseoir sur le côté passager sans cérémonie, près de son ange déchu. Elle garde le silence parce que, contrairement à la plupart des gens, le silence ne l’a jamais gênée. Mais il lance alors la conversation avec une question. Son regard tourné vers l’horizon, elle lui répond avec un grand sérieux. – Je suis venue admirer le magnifique paysage. C’est faux, bien sûr. Mais elle n’est pas trop du genre à raconter sa vie, Amanda. Qu’elle vienne acheter de la drogue ou cueillir des pâquerettes, elle garderait tout autant le mystère. Mais au moins, elle lui répond.

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Le trajet se fait dans le silence presque absolu. Ça ne la dérange pas, ça lui donne même le temps d’oublier son irritation. Il semble l’avoir cernée, assez pour s’empêcher de parler de tout et de rien. Elle déteste parler de tout et de rien. Quand il affirme qu’ils vont tenter de changer sa batterie le jour même, elle est hoche simplement la tête en signe d’acquiescement. Elle espère qu’ils auront la pièce qu’il faut mais de toute manière, sa journée est fichue. Lorsqu’ils arrivent enfin au garage, elle saute du camion et le laisse avec les autres mécaniciens se charger de sa voiture. Elle entend alors le nom de son ange déchu. Graham, il s’appelle Graham. C’est presque surprenant qu’elle connaisse enfin son prénom le jour où ils sont sans doute les moins proches l’un de l’autre. Mais l’information rentre dans sa tête, au même titre que le surnom donné par l’un des employés. Il n’est pas seulement mécanicien, il est aussi le patron apparemment. Mais restée silencieuse, la belle suit son amant jusqu’à son bureau. Une fois dans la pièce, elle le laisse faire ses recherches sur son ordinateur alors qu’elle jette un regard aux alentours. – J’aurais dit électricien. Ou plombier. Je n’étais pas si loin. dit-elle d’un coup avant de s’approcher finalement de lui. Elle s’assoit sans cérémonie sur son bureau et reprend ensuite. – Alors ?

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Elle sent que leur proximité le trouble, mais elle n’en joue pas. Elle lui demande sagement ce qu’il en est pour sa voiture, et fort heureusement, il lui apprend bientôt qu’il va pouvoir réparer tout de suite ce qui ne va pas. Mais alors qu’il se lève et se retrouve à sa hauteur, il vient subitement l’embrasser sans prévenir. Elle ne s’y attend pas, parce que jusque-là il s’est montré étonnamment professionnel, mais elle le laisse faire. Elle prolonge un instant leur baiser avant de reculer son visage pour le contempler, le regard un peu joueur. – Je vois que le service clientèle prend son travail au sérieux. Elle se laisse glisser sur le bureau pour se retrouver debout à nouveau. Elle suit l’ange déchu jusqu’à sa voiture, puisqu’apparemment, c’est lui qui va s’en occuper. Elle ne sait pas trop si c’est parce qu’il s’agit de la sienne, ou simplement parce qu’il a commencé le boulot en venant lui-même la chercher. Elle ne juge pas son travail, quoi qu’il en soit. Elle gère un club de striptease, elle a elle-même été stripteaseuse, alors elle n’est pas vraiment la meilleure personne pour porter un jugement sur lui. Arrivant jusqu’à sa voiture, elle le laisse faire ce qu’il a à faire alors qu’elle s’adosse au mur face à lui. – Ma présence ne va pas trop te déranger, ça va ? demande-t-elle, presque un peu taquine. Elle l’aime bien… Graham. Elle ne le connait pas, mais peu à peu, elle s’habitue à lui. Et pour une associable comme elle, c’est beaucoup.

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“Graham & Amanda ”

Elle ne sait pas si c'est parce qu'elle est en train de partager tout son après-midi avec lui ou simplement parce qu'elle apprend peu à peu à le découvrir. Ou c'est peut-être parce qu'elle le voit dans un autre contexte, dans son élément à lui pour une fois et non le sien. Mais elle laisse quelques barrières se briser, pas toutes mais quelques unes. Elle le regarde alors qu'il lui répond, et se dit qu'il n'a pas tort. Alors elle reste toujours à sa place, à quelques mètres de sa voiture tandis qu'il se met au travail. Elle plaisantait un peu plus tôt mais elle n'a pas vraiment conscience qu'il est déconcentré par sa présence. Si elle avait envie de le déconcentrer, elle serait capable d'en faire bien plus. Mais peut-être que c'est une bonne chose qu'elle ne s'en doute pas, elle serait capable d'en profiter. Mais il cache plutôt bien ses pensées, Graham. A sa question, elle secoue la tête, amusée par son insistance. Quoi ? Elle n'a pas une tête à admirer la nature ? Pourtant, enfant, elle adorait ça. Ado aussi. Enfin, bref. Elle a l'air de l'intriguer. - Tu ne lâches rien, hein. Elle marque un silence, comme si elle hésite. Elle ne sait pas si elle peut se fier à lui, mais elle ne prend que trop de risques.Ce n'en sera qu'un parmi d'autres. Et quelque part, elle a l'impression qu'il sait se taire. - J'étais partie acheter de la cocaïne. lâche-t-elle avec naturel, comme si elle lui disait qu'elle était allée acheter du lait. Surement parce que c'était un achat tout à fait naturel pour elle. Mais, cette fois, il pouvait s'estimer heureux parce qu'elle lui racontait la vérité. Enfin, s'il la croyait. 

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Il ne semble pas outré, ni même surpris. Il a même l’air content, en fait. Peut-être qu’il consomme de la drogue lui aussi. Ça leur ferait au moins un point commun. Mais elle en doute, Amanda. Elle comprend vite le cheminement qu’il fait entre la cocaïne, l’herbe et sa moquette. Elle laisse un sourire amusé apparaître sur ses lèvres à ce souvenir, le premier sourire qu’elle lui accorde depuis qu’il est venu la chercher à Staten Island. – Je n’ai pas oublié. lui rétorque-t-elle avec assurance, bien décidée à ce qu’il répare ses bêtises. Oui, ses bêtises. Elle le regarde poursuivre son travail sans se douter un seul instant de ses pensées. Alors qu’il relance la conversation, elle se dit qu’il est bien curieux. Elle, elle ne l’est pas du tout. Pour être curieux, il faut savoir regarder autour de soi. Amanda, elle, elle a les yeux fermés sur le monde qui l’entoure depuis trop longtemps déjà. Distraitement, elle passe la main dans ses cheveux. – Tu me semblais doué de tes mains. dit-elle le ton neutre même s’il y a inévitablement un sous-entendu dans ses paroles. Relevant le regard vers son ange déchu, elle ne sait pas quoi répondre à sa deuxième question. – Calimero. lance-t-elle, un peu peste, mais c’est aussi la première fois qu’elle le taquine réellement.  

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Elle voit un sourire amusé, presque fier apparaître sur le visage de son bel ange déchu. Ah, les hommes. A ce niveau-là, ils sont sans doute tous les mêmes. Elle a conscience qu’elle le flatte mais elle ne peut nier qu’il sait lui faire prendre du plaisir. Sinon, elle l’aurait déjà viré de sa vie. On ne peut pas dire qu’ils partagent autre chose que le sexe… Enfin, jusqu’à cet après-midi. C’est comme si une certaine complicité s’installe doucement mais surement entre eux. C’est à prendre avec des pincettes. Il est difficile de savoir ce qu’il en est pour lui, mais Amanda peut passer d’un extrême à l’autre à une vitesse impressionnante selon son humeur. Elle est lunatique, elle l’a toujours été. Mais, là, l’atmosphère est plus légère qu’elle ne l’a jamais été entre eux. Elle vient même de le faire rire. C’est la première fois qu’elle entend le rire de Graham. Et il est rare, aussi, qu’elle fasse rire. Elle a un humour un peu particulier, un peu difficile à cerner, un peu comme elle en somme. Mais, à ses paroles, elle acquiesce doucement de la tête, même s’il ne le voit pas parce qu’il a le regard rivé sur sa voiture. Alors, elle ajoute. – Je le sais. Sans réfléchir, elle commence à avancer vers lui. Elle n’est pas restée sage très longtemps. Elle s’arrête juste derrière lui et fait passer ses mains, aussi froides que d’ordinaire, sous le tee-shirt de son amant. Elle vient caresser son torse, presque avec douceur. Elle approche ses lèvres de son oreille pour lui susurrer dans un murmure. - Maintenant, tu sais qu’une autre femme peut te faire de l’effet. Elle est clairement en train de l’allumer, là. Elle ne songe pas au lieu où ils se trouvent, ni même au fait que non loin, il y a ses employés. Mais elle finit par retirer doucement ses mains pour reculer. Et elle reprend d’une voix à nouveau normale. – Est-ce tu as déjà fait l’amour sur le capot d’une voiture ?  

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A sa question, il ne réagit pas. Il l’ignore même. Elle, elle ne le quitte pas des yeux, attendant patiemment sa réponse. Elle pourrait même se demander s’il a entendu sa voix, mais elle l’a vu montrer son trouble. Il s’est mordu la lèvre, lui donnant envie de le faire à sa place par la même occasion. Mais elle patiente, elle attend qu’il craque, au moins qu’il la regarde. Lorsqu’enfin, elle le voit refermer le capot de sa voiture et lui faire face. Finalement, il lui donne la meilleure réponse possible à sa demande, la réponse qu’elle attendait de lui. Elle laisse un sourire séducteur apparaitre sur son visage alors qu’il s’approche d’elle, un sourire qui disparait très vite lorsqu’elle sent ses lèvres venir capturer les siennes sans attendre. Ce qui n’était alors qu’une question qui pouvait presque paraitre innocente devient une réelle envie à cet instant où il a cette réaction soudaine, inattendue et tellement masculine. Celle de l’homme exigeant, qui sait ce qu’il veut, et c’est elle. Tout de suite, elle répond au baiser fougueux qu’il lui offre. Elle laisse sa langue s’entrelacer à la sienne en laissant l’envie l’envahir de plus en plus. Il la plaque contre le capot de la voiture, alors que le désir brûle déjà son bas-ventre. Elle lui mord la lèvre, exactement comme il l’a fait lui-même quelques secondes plus tôt. Et, en même temps, elle entoure ses bras autour de son cou pour le rapprocher davantage d’elle. Elle se fiche qu’il ait les mains sales à cause de son travail, elle se fiche qu’ils risquent d’être surpris par n’importe qui. En fait, c’est même encore plus excitant, tout ça. Elle l’embrasse un peu plus avidement tout en le serrant un peu plus contre elle.

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Elle sent le désir la submerger en quelques instants seulement, elle a envie qu’il la prenne, là, sur sa voiture. Elle profite des caresses qu’il offre à sa poitrine en l’embrassant d’une façon plus fougueuse, plus bestiale même. Mais elle entend en même temps que son amant le prénom qu’elle lui connait maintenant. Agacée d’avoir été dérangés, elle ferme douloureusement les yeux alors que Graham se détache d’elle. Il montre une certaine frustration, ce qui est plutôt agréable à voir, mais aussi une gêne, semble-t-il. Elle, elle est un peu irritée, mais elle s’en accommode. Elle regarde le perturbateur, assez surprise par ses paroles qu’elle ne comprend pas tout de suite. Elle ne connait pas Graham, le gentil mécanicien qui semble vivre pour son travail. Elle connait Graham, cet homme qui laisse ses pulsions le guider même en pleine rue, même en danger. A côté, ici, c’est peut-être leurs ébats les plus normaux. Mais étrangement, elle est plutôt contente par la réaction de cet homme. L’idée qu’il soit différent avec elle ne peut que la flatter. – Il se débrouillait très bien tout seul. confirme-t-elle, avec un grand sérieux qui fait sourire son interlocuteur. Malgré les tentatives de Graham, celui-ci s’approche d’elle pour lui parler. Il la complimente au passage. – Elles ne sont pas jolies, les autres ? demande-t-elle, réellement intéressée. Sa question fait rire l’employé, ou peut-être l’ami elle n’en sait rien alors qu’il lui répond. – Pour ça, faudrait qu’elles existent ! Cette fois, elle ne peut s’empêcher de sourire. Pourquoi n’est-elle pas surprise ? Elle ne répond pas, elle pense qu’il va bien partir, mais il poursuit. – Moi, c’est Steve. Elle hoche doucement la tête, et répond simplement. – Enchantée Steve. Non, elle ne va pas lui dire son nom. Elle est gentille, mais pas à ce point. Et puis, elle n’est que de passage, Amanda. Dans la vie de l’un comme de l’autre.

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“Graham & Amanda ”

Alors que ce cher Steve semble vouloir sympathiser avec elle, son ange déchu semble de plus en plus en colère. Elle ne comprend pas, Amanda. Elle l’a déjà vu énervé au point de la plaquer violemment contre un mur mais là c’est différent, il semble vraiment prêt à tuer celui qui a pourtant l’air d’être un ami. Elle ne comprend pas, parce qu’ils ont été dérangés avant que le désir ne devienne trop violent. Mais elle le sent qui lui attrape la main. C’est la première fois qu’ils ont un contact de ce genre. Ils en ont pourtant vécu d’autres bien plus charnels mais elle ressent celui-là comme quelque chose de beaucoup plus complice. Et ça la trouble légèrement. Mais elle ne dit rien et le suit jusqu’à sa voiture. – Au revoir Steve. dit-elle d’un air un peu narquois. Elle serait presque désolée pour lui, presque. Il n’a pas l’air de comprendre mieux qu’elle la réaction de son employeur. Elle se retrouve dans sa voiture, côté passager. Le véhicule fonctionne, et bientôt ils quittent le garage pour prendre la route. Au début, elle reste un peu silencieuse. Son comportement l’intrigue mais elle ne sait pas comment aborder le sujet sans avoir l’air trop intéressée par ses états d’âme. Elle n’a pas envie qu’il pense qu’elle s’en préoccupe. Mais elle a bien envie de savoir, oui. Elle cherche dans son sac à main son paquet de cigarettes, presque vide, pour s’en griller une. Elle l’allume et prend le temps d’en tirer une taffe avant de couper court au silence. – Il semblerait que tu ne sois pas si angélique que ça. commente-t-elle finalement d’une voix tranquille, tournant les yeux vers lui.

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Elle ne rétorque rien à ses paroles. Mais elle pèse plus ses mots qu’elle n’en a l’air. Il commence à l’intriguer, son ange déchu pas si angélique. Elle a tendance à catégoriser les gens en deux catégories. Ceux qui sont heureux, plus ou moins, et qui tentent de vivre leur vie. Et les gens comme elle, ceux qui se laissent sombrer, ceux qui se détruisent, ceux qui ont décidé qu’ils n’aiment pas la vie. Entre ces deux extrêmes, elle ne sait pas où le placer. Il est peut-être dans une sorte de purgatoire. Oui, ça doit être ça. Il est divorcé, surement à un tournant de sa vie. Il est perdu entre deux eaux mais en trainant avec elle, il finira surement par choisir l’enfer. Mais elle garde ses réflexions pour elle, fumant simplement sa cigarette dans le silence. Elle ne se préoccupe même pas du trajet, jusqu’à ce qu’elle reconnaisse les premiers immeubles. Ils arrivent finalement devant le sien, alors elle détache sa ceinture et relève les yeux vers Graham. Il semble tellement sérieux, elle ne le connait pas ainsi. Elle finit même par se demander s’il n’y a pas un antécédent avec ce Steve. Peut-être que sa femme l’a trompé avec lui. Mais elle sort subitement de ses réflexions alors qu’elle le sent lui voler un baiser. Elle le prolonge, juste quelques secondes et finit par s’en détacher. – Est-ce que je dois te payer en nature ? demande-t-elle avec une douceur qui ne lui ressemble pas. Elle ne sait même pas pourquoi, d’ailleurs. Il a été gentil avec elle, mais ça elle s’en fiche. Elle aurait été capable de partir sans se retourner malgré tout. Non, c’est autre chose. Elle ne cesse de penser à la manière dont il lui a pris la main, en l’attirant avec lui comme s’il craignait qu’elle ne le suive pas. Elle commence tout juste à comprendre qu’il est peut-être en train de dangereusement s’attacher à elle.  

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Elle arrive à lui décrocher un sourire. Elle est forte, hein. Elle n’a pas vraiment réfléchi au fait qu’elle devrait peut-être le payer. Elle sent l’emprise qu’elle a sur lui, alors pourquoi faire semblant. Elle peut paraître arrogante, mais ce n’est pas ça. Ce n’est pas non plus un moyen de se protéger, ou alors elle ne se l’avoue même pas à elle-même. Au fond, elle mène simplement sa vie comme elle l’entend, même si cela signifie qu’elle outrepasse parfois ses droits. Sans un mot, elle sort de sa voiture, Graham sur ses talons. Graham. Ça lui fait bizarre, finalement, de connaitre son prénom. Ils entrent dans l’immeuble, puis rejoignent son appartement. Elle vient de fermer la porte quand elle entend sa proposition. Elle reste surprise un instant. Elle n’est pas le genre de femme avec qui on a envie de déjeuner, Amanda. Elle, on vient la voir quand, pardonnez le langage, on a envie de tirer son coup. Personne ne voudrait partager un moment normal avec une femme pareille. Et il ne faut pas y voir une plainte, ça l’arrange très bien. Elle offre son corps à bien des hommes, mais au fond, c’est un loup solitaire. Elle n’aime pas les gens. Elle les trouve mauvais. Ils font semblant d’être bons, mais ne le sont que pour en tirer profit. Elle, au moins, elle ne fait pas semblant. En général, son comportement si marginal fait fuir les gens. Même ses amants, une fois qu’ils ont ce qu’ils veulent, ils ne trainent pas. Parce qu’elle n’est pas une femme bien, une femme qu’on aime, une femme qu’on épouse. Elle est le pire cauchemar de ces femmes-là, Amanda. Et pourtant, il veut déjeuner avec elle. Elle est troublée, mais jamais elle ne l’avouerait, même pas à elle-même. Alors elle préfère prendre la situation à l’envers. – Tu sais que je pourrais me vexer. Il préfère quand même manger plutôt qu’une partie de jambes en l’air avec elle. Mais, au fond, si elle réagit comme ça, c’est pour éviter de se demander pourquoi il tient tant à partager quelque chose d’aussi… intime qu’un déjeuner. Elle pose son sac et retire sa veste avant de s’asseoir sur l’un des hauts tabourets face au comptoir de sa cuisine. –Vas-y. Si tu arrives à trouver quelque chose à cuisiner. le défit-elle du regard, parce qu’évidemment, c’est lui qui s’y colle. Ils pourraient tout aussi bien commander quelque chose, mais ce serait moins drôle. Parce qu’elle n’a pas menti, elle n’a presque rien à manger chez elle. Des pâtes, peut-être. En fait, elle n’en sait rien. Elle ne mange jamais. Certains disent qu’elle est un vampire.  

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