Depuis qu'elle avait quitté l'Ecosse Antonina avait eut l'occasion de sympathiser avec des personnes de tout milieux, ou presque; contrairement à son enfance où "l'élite" côtoyait seulement "l'élite". Cependant, certaines personnes de son entourage avaient très bien réussies leur vies, ou avaient, comme elle, quelques prédispositions financières. Tout ça pour dire que ce soir là au Ritz-Carlton l'élégante blondinette pouvait presque s'étonner de ne pas voir ses parents ou bien ses frères et sœurs, car autant dans le décor que dans la population tout était familièrement luxueux.

Au début elle avait été réjouie, par sympathie, un peu par politesse aussi peut-être; des fiançailles c'était sans doute le comble de la bonne nouvelle à 30 ans, quoi que la petite annonce de la grossesse en route au moment de porter un toast avait aussi fait son petit effet. Pourquoi pas porter un toast en plus ? A leur bonheur, et puis pleins d'autres toast en privé pour son propre bonheur. Il y avait certes quelques jolis hommes, la moitié au moins déjà embringués dans une relation, peut-être que le quart restant avait une activité professionnelle trop "envahissante", et dans ce qui restait encore, seuls 10% devaient ne pas avoir de "vices cachés" puisque c'était visiblement ce que développaient les hommes à partir d'un âge : ce qui les rendait infréquentables et menaient des jeunes femmes comme Antonina à ne plus compter les verres, à considérer la vie de famille comme un verre de vin blanc moelleux et quelques chats. C'était peut-être aussi eux qui la poussait à considérer sérieusement les avances d'un jeune homme vendeur sans grandes ambitions. Sympathique, certes, mais .. come on !! C'était un égarement, un égarement causé par le peu de confiance en elle que pouvait avoir Miss Curtis.
Fort heureusement, cela ne l'empêchait pas de savoir choisir les tenues qui la mettait en valeur.

Occupée à tourner et retourner sa vie (ou son absence de vie ?) tout en sirotant son verre qu'elle s'amusait parfois à observer, Antonina fût interrompue par l'arrivée d'un Michel_Lourdaud.png , ce qui lui fit remarquer l'heure et penser qu'il était grand temps de s'éloigner de cette soirée.

- Bien, nous nous reverrons à la répétition du mariage ! Ou la naissance du gosse, ou la répétition de l'accouchement, bref ahaha.

Lâcha-t-elle avec empressement avant de quitter la grande salle pour rejoindre la réception. Tout semblait princier et pourtant c'était pas vraiment le ressenti de la jeune femme qui demanda à ce qu'on lui apporte son manteau tandis que l'alcool lui donnait l'impression de pouvoir braver le froid de Montréal dans sa jolie robe. Ainsi donc elle tourna la tête pour observer le froid, il y avait quelqu'un dehors qui marchait sans jamais quitter les alentours.
Attrapant son grand verre ballon le médecin ne réfléchit pas et se dirigea vers la sortie sans faire grande attention aux quelques remarques quant à sa tenue ou même au verre qu'elle sortait. Peut-être qu'on la pensait importante, ça s'avérait utile (bien qu'inconscient). La curiosité l'avait piquée sans explications, et voilà que le froid vint la piquer de mille aiguilles lorsqu'elle arrive dehors.

- Riley ?

C'était sorti spontanément, à vrai dire Antonina ne connaissait pas beaucoup d'hommes, ou plutôt de jeunes hommes, de près d'1m90 avec ce genre de dégaine. Et puis.. il était la dernière personne qu'il lui avait été donné de rencontrer au hasard dans la rue, la nuit. Alors peut-être qu'elle s'y attendait un peu alors que rien n'avait pourtant rendu la situation prévisible ?
Peut-être qu'elle avait simplement dit le premier prénom qui lui était venu. Peut-être qu'il était la seule personne réellement fun qu'elle connaissait, la seule qui apportait un peu d'optimisme dans sa vie qu'elle trouvait terne ?

- Je suis désolée pour ton anniversaire tu sais.

Il était prêt d'une heure du matin et le réflexe d'Antonina n'avait pas été de lui demander ce qu'il fichait dans le coin dehors et puis dans le coin surtout (l'hôtel Ritz-Carlton sérieux ?), mais de s'excuser quant à son absence à un anniversaire qui remontait à un peu moins de deux mois. Faut dire ça lui trottait en tête depuis, ils avaient été proches d'une manière qu'elle n'aurait jamais soupsonnée, et alors qu'il fêtait une année en plus, ce qui, il lui avait déjà vaguement dit lors des consultations, l'angoissait, elle l'avait abandonné. Préférant remettre de "l'ordre" et de la "distance" entre eux. Au nom de la bienséance sans doute.
Un majordome sorti et interpella le médecin pour lui rendre manteau et écharpe avant de lui reprendre le verre qu'elle avait emporté. Pinçant les lèvres, amusée et contrariée, Antonina enfila son manteau.

- Tu sais quoi ?

Lança-t-elle très spontanément en marchant.

- Qu'ils aillent se faire foutre avec leur mariage et leur gosse. Moi, j'ai une putain de voiture. Viens.

Une seconde fois le maladroit vendeur "sans ambitions" se présentait comme un chevalier blanc, mais plus moderne, façon anti-héros, c'était amusant. Sur le moment la jeune femme ne le réalisait certes pas, elle était juste prise d'ivresse mais le baume au coeur qui relevait sa soirée, qui transformait son alcool maussade en alcool gai c'était bien le fait que depuis quelques minutes Riley se pelait le cul à l'attendre sans même qu'elle ne l'imagine.

Antonina ne pût s'empêcher de rire à ce que Riley embrayait naturellement vis-à-vis de sa voiture. Elle semblait assez masculine sur ça la jeune femme, car sa voiture était son bijou, il ne fallait ni l'abîmer ni la salir. Et surtout, il ne fallait pas la provoquer sur la route car elle avait tendance à réagir de manière trop fière lorsqu'elle était au volant, Antonina.
La bonne volonté de Riley l'amusait sincèrement, l'alcool jouait sans doute. En soit la jeune femme voulait des enfants. Elle voulait des enfants, elle voulait un mariage, elle voulait ce genre de repas idiots où l'on répétait le repas et les discours si on peut dire. Ces repas où on en faisait des caisses pour des fiançailles. Elle voulait tout ce que ces personnes ennuyeuses avaient. C'était tout ce qu'elle avait jamais souhaité. Mais son alcool n'était plus décidé à être triste, ainsi donc au lieu de mal réagir à l'idée qu'avoir un gosse était selon Riley pas une bonne idée, elle fût plutôt touchée par sa façon de toujours mener le désagréable au léger.

-Non , non c'est bon qu'ils s'étouffent, on en a fini avec cette soirée !

Répondit-elle avant d'ouvrir sa voiture et de s'installer côté conducteur. A vrai dire Antonina s'était laissée tomber sur le siège sans grand effort et n'en bougeait plus. Ses joues étaient roses, comme à chaque fois qu'elle était ivre. Affalée, elle tourna la tête vers son patient et ses idées de super héros, encore. La jolie blonde en rit tout naturellement.

- Toi t'es clairement Robin.

Elle savait pas franchement pourquoi, ou peut-être que si mais elle n'y pensait pas à ce moment là. Tout le monde bavait sur batman, le mystérieux batman, le canon batman, celui qui est tapi dans l'ombre prêt à nous sauver. Mais les batman finalement Antonina les connaissait bien. Et ils étaient ennuyeux. Robin c'était le personnage surprenant et amusant. Le jeune sexy qui se révèle plus malin qu'il n'y paraît.

-Et moi chui.. bourréééééée.

Elle exagérait un peu, elle n'était pas bourrée au point de monter sur les tables (quoi que ? ) mais elle était assez pompette pour devoir éviter le volant. Et pourtant, pourtant pourtant, elle se mit à démarrer.

-Admire !

Il fallait avouer qu'elle avait une certaine dextérité à ça, mais pas sûr que ce soit pour autant une bonne idée..