Nom + Després. Prénom(s) + Camille Jules. Date et lieu de naissance + 15 juillet 1986. Âge + 28 ans. Nationalité + Française. Origines + Française et Irlandaise. Situation amoureuse + Célibataire. Sexualité + Homosexuelle. Métier + Institutrice. Groupe + Life's for the living ou King City.
Caractère + Indépendante, protectrice, méfiante, patiente, loyale, secrète, têtue, susceptible, rancunière, persévérante, énergique, compliquée

Vous savez ce que c'est que d'être la seule fille de la famille ? Vous êtes chouchoutée par les parents et même par les frères. Personne ne vous oublie et on ne vous engueule quasiment jamais. Surtout, vous ne risquez pas d'être embêtée dans la cour de récréation, il y aura toujours un des gars pour venir vous protéger. Certes, ils feront parfois la tête parce que leur petite sœur chérie les charrie un peu trop, mais cela ne dure jamais très longtemps. En bref, on peut dire que c'est le rêve absolu. Seulement, ce serait bien trop simple si ça avait été mon cas. Non, il a fallu que j'arrive après cette foutue fille unique. Je n'étais bien entendue par attendu par mes parents, sinon ça aurait été bien moins difficile. Et si ma présence n'importunait pas assez, il avait fallu que ma mère meurt en me donnant la vie, me rajoutant un fardeau de plus dès le début de mon existence. Je ne me souviens plus des premières années et j'ai l'impression que c'est aussi bien. Mes souvenirs doivent remonter aux débuts de mes bêtises ou du moins à mes premières punitions. En y repensant, je ne suis pas vraiment sûre que mes premières fessées étaient méritées. C'était surtout ma fameuse sœur qui me mettait tout sur le dos, d'une façon ou d'une autre. Au départ, je ne blâmai pas mon père, il ne pouvait pas savoir. Il était bien trop occupé à essayer de s'occuper de nous, sans oublier de ramener de l'argent à la maison avec un travail pas des plus simples. Il était juste à bout et ne pouvait pas voir toutes les manigances de l'autre. A vrai dire, même les instituteurs ne voyaient pas à travers ses manipulations. Elle avait un tel don pour sortir un sourire d'ange en me pointant du doigt. Alors, je prenais sur moi et restais silencieuse tout en subissant. On dit souvent que la vengeance est un plat qui se mange froid, mais j'en suis plutôt venue à la conclusion que quitte à me faire engueuler pour des bêtises que je n'avais pas faites, autant les faire. Ainsi, arrivée au collège, je ne me faisais plus suppliée pour être la pitre de la classe. Entre cancre, guignole, clown, incontrôlable, incapable… J'en avais eu des surnoms et des adjectifs à mon propos pendant les conseils de classe. Je ne les écoutai pas, j'étais bien trop habituée à être rabaissée. En fait, j'en profitai pour leur montrer à tous que j'étais capable de dépasser mes limites sans eux, contre eux. Mes notes n'étaient pas superbes, certes, mais elles suivaient assez pour que je passe limite vers le niveau au-dessus.

Cependant, ça ne pouvait pas continuer pendant toute ma scolarité. La vie ne voulait pas me laisser tranquille et heureuse. Il fallait que je trouve toujours un moyen de me faire engueuler. Alors, en arrivant au lycée, tout se compliqua. Mes frères étaient partis en études supérieures et il ne reste plus que nous, les filles, à la maison. Mon père avait beaucoup moins de mal à faire attention à nous et à mes insolences. Étant dans ma période rebelle depuis des années, ça ne m'avait pas perturbée plus que cela. J'avais juste pu entraîner ma voix à crier un peu plus fort, c'était toujours utile dans les concerts. Seulement, en vérité, ça faisait bien plus mal que je n'oserai l'avouer. Quand on vous regarde vraiment et que l'on ne voit que le reproche ou la tristesse dans les yeux de son père parce que c'est de votre faute s'il n'est pas heureux, c'est destructeur. Enfin, au moins, il y avait des sentiments dans son regard, un petit quelque chose qui montrait que je comptais d'une façon ou d'une autre pour lui. Comme le jour où il avait découvert que j'aimais les filles. Cela avait été un choc et une catastrophe nucléaire pour lui, mais au moins il y avait quelque chose. Il ressentait un truc au fond de ses tripes pour moi, envers moi. C'était presque rassurant, quand bien même j'étais enfermée dans ma chambre et privée de tous moyens de communication. Alors peut-être que je l'avais trop poussé à bout. Peut-être qu'il n'en pouvait plus de moi et c'était pour cela qu'il m'avait envoyée en voyage humanitaire au Congo. J'aurai pu dire non, je venais d'avoir dix-huit ans et j'avais mon bac en poche, mais sa façon de jeter mes affaires dans un sac et de me tendre les papiers m'avait convaincue de partir pour de bon. Il ne servait à rien d'insister. Quand quelqu'un ne voulait pas de toi, il fallait battre en retraite, alors toute une famille…

Pourtant, derrière chaque mauvaise nouvelle peut s'en cacher une bonne. Je n'aurais jamais cru pouvoir oublier cette vision de mon père me rejetant, mais 'ne jamais dire jamais'. Dès mon arrivée dans le village, tout s’évanouit. J'étais juste admirative de tout le labeur que la population mettait en place pour se développer ensemble, pour vivre correctement. Il n'était pas question d'abandonner qui que ce soit. Même moi, jeune étrangère sans aucune qualification, ils ne me laissèrent pas de côté et bientôt j'aidai dans l'éducation des enfants. Rien n'était plus réjouissant de les voir comprendre et en demandant plus. Leur faire la lecture, leur apprendre le français, des nouveaux mots, parfois un peu de calcul, tout pour satisfaire leur curiosité. Seulement, mon temps au Togo se termina bien trop vite et je fus bientôt de retour dans l'avion directement la maison. Je n'étais pas sûre de pouvoir encore l'appeler comme cela, mais je ne voyais pas d'autre qualificatif pour l'instant. Ce fut sans surprise que je ne découvris personne pour me souhaiter la bienvenue. Ils étaient bien trop occupés par leur propre vie pour se faire du soucis. Mon absence avait dû être un véritable soulagement  pour eux, sans aucun doute. D'ailleurs, ils ne prirent pas la peine de faire plus attention à moi pendant les cinq années qui suivirent. Je faisais mes études, faisais ma vie et tant que je ne les dérangeai pas, tout allait bien. Pourquoi une telle indifférence ? Je ne le comprenais pas moi-même et je ne cherchai plus à comprendre. La seule chose qui importait maintenant pour moi était de partir de là et vite. Je n'hésitai pas longtemps dans mes choix de vœux après avoir reçu mon concours d'institutrice : premier choix → Guyane Française. Je n'avais pas le choix que de faire cinq années avec l'éducation nationale française, mais rien ne m'obligeait à rester en métropole. J'étais presque certaine d'être acceptée, il y avait peu de fous pour faire ces choix-là. Bingo ! Je partais de l'autre côté de l'océan dès ma première année de métier ! C'en était fini de cette famille ignoble !

Étrangement, je ne mis pas si longtemps que cela à m'habituer à mon nouveau rythme de vie. Les premiers mois furent compliqués à cause de la tâche qui m'était demandée, mais j'étais heureuse et cela faisait du bien. Pourtant, je me sentie bientôt seule. J'avais des amis bien sûr, mais ce n'était pas ce genre de solitude qui m'envahissait. J'avais besoin de plus, d'une famille. Cependant, je ne me voyais pas tomber enceinte et encore moins par don de sperme ou grâce à un coup d'un soir. Je ne pensais même pas être capable de supporter neuf mois d'attente, remplie d'hormones et prendre le risque de peut-être mourir à la fin du voyage. Et puis, il y avait des petits qui n'attendaient que nous pour prendre soin d'eux. Je me lançai donc dans ce projet un peu fou et surtout très long. Je n'avais pas peur de prendre de risques, je ne pensais plus être à ça près. J'avais en plus tout mon temps, j'étais encore sur place pendant quelques années. Je me retrouvai bientôt sous le charme d'une petite fille de deux ans. Il n'y avait pas de mots pour l'expliquer, c'était juste comme ça. Je savais que c'était elle que je devais adopter. Seulement, la procédure fut plus longue que je ne l'avais prévu et j'eus du mal à supporter de la voir uniquement durant les heures de visites. J'avais l'impression de manquer tellement d'étapes. Je ne comprenais pas pourquoi cela m'était si longtemps. J'avais un travail stable et plutôt bien payé. Je n'avais peut-être pas de famille pour m'aider, mais je n'en avais pas besoin, j'avais assez de force et de volonté toute seule. Finalement, le bonheur parfait fit son entrée dans ma vie ainsi que cette magnifique fillette de quatre ans. Ma vie d'avant était totalement oubliée, je pouvais aller de l'avant avec plaisir. Pour marquer le coup, je nous prévoyais un changement de paysage. Il fallait que j'en profite avant que la petite ne grandisse trop et s'attache à ses camarades. Je n'oublierai jamais ses origines et je ferai en sorte qu'elle visite son pays d'origine, mais il était temps de prendre un nouveau départ digne de ce nom : Montréal, nous voilà !