Ces dernières semaines s’étaient avérées complexes émotionnellement et physiquement pour Valentina puisqu’elle avait un défilé qui l’angoissait à préparer et que le manque de coopération de Thomas à l’égard de leur vie commune avait tendance à l’épuiser. Depuis le début de sa grossesse, les nausées étaient omniprésentes et même si le médecin lui avait prescrit des médicaments pour l’aider, l’italienne avait perdu un peu de poids. Non seulement le stress lui coupait l’appétit, mais elle avait l’impression de se battre avec son estomac dès qu’elle avalait quelque chose, si bien qu’elle préférait encore ne rien manger malgré la mise en garde du médecin. Elle avait un défilé à préparer, elle ne pouvait pas vraiment se permettre d’être malade trois ou quatre heures par jour.

Heureusement, ce matin-là, les nausées semblaient s’être calmées et c’était une bonne chose puisqu’elle avait donné rendez-vous à Amanda, au centre-ville de Manhattan, pour une virée shopping. Ça lui ferait un bien fou de sortir et de passer une partie de sa journée en compagnie de son ancienne prof de danse, encore plus en sachant qu'elle s'apprêtait à claquer plusieurs centaines de dollars en vêtements, en chaussures et en sacs à main. Vêtue d'un jeans bleu pâle, d'une paire d'escarpins et d'un débardeur blanc qui lui allaient comme un gant pour elle ne savait combien de temps encore, Valentina observa son reflet dans le miroir de sa chambre et décida de nouer ses cheveux en un chignon à la base de sa nuque. Ses prunelles se posèrent instinctivement sur son ventre alors qu'elle se retournait légèrement dans le but d'observer son corps de profil, sans même déceler une once de changement depuis la dernière fois. Elle saisit ses lunettes de soleil, ses clés et son téléphone, quitta l'édifice par l'ascenseur avant de retrouver son chauffeur qui l'attendait dans le hall d'entrée. Il la débarrassa même de son sac à main avant de l'inviter à la suivre à l'extérieur. « Je dois d'abord passer au travail. » expliqua-t-elle lorsqu'elle se fut installée à l'arrière et lui à l'avant.

Elle rejoignit son équipe le temps de régler quelques petites choses, s'assura que tout allait bien avant de partir. Elle jeta un coup d'oeil à sa montre lorsqu'elle fut de nouveau installée dans le véhicule, demanda à ce qu'on la dépose là où elle avait donné rendez-vous à Amanda à savoir, devant la boutique Gucci. Son regard se posa sur la bague qu'elle portait à son annulaire et qui témoignait de son mariage imminent. Thomas ne l'aimait pas et ne l'aimerait jamais, Valentina l'avait compris et accepté depuis longtemps, mais elle n'était pas certaine de pouvoir vivre avec le fait qu'il ne voulait pas ce bébé qu'elle portait.

Elle poussa un soupir et jeta un coup d'oeil par la fenêtre, laissant le paysage peuplé de gratte-ciels et de taxis défiler devant ses yeux. Elle remercia le chauffeur lorsque ce dernier arrêta la voiture devant la boutique, quitta l'habitacle afin de rejoindre Amanda, qui l'attendait déjà. Aussitôt, la jeune femme se forgea un sourire et s'empressa de la rejoindre pour la serrer dans ses bras.

« Je suis contente de te voir et je suis désolée pour les deux autres fois où j'ai dû annuler sans trop prévenir à l'avance. »

Évidemment, la femme qui se trouvait devant elle était déjà au courant de sa grossesse puisque la nouvelle se trouvait sur plusieurs réseaux sociaux, mais Val' avait pris la peine de lui en parler lorsqu'elle avait dû annuler leur journée deux fois d'affilée, pour les mêmes raisons. « Tu vas bien ? »

Valentina sourit lorsqu'Amanda lui assura qu'elle ne lui tenait pas rigueur pour les annulations de dernière minute, hocha simplement la tête avant de lui demander comment elle allait. Les deux femmes ne s'étaient pas vues depuis un long moment puisqu'elles avaient toutes deux un horaire plutôt chargé, encore plus maintenant que l'italienne devait rattraper plusieurs journées de travail où elle avait décidé de rester à la maison parce qu'elle se sentait trop mal. La question de la brune la surprit ensuite et elle haussa doucement les épaules avant de pousser un soupir qu'elle aurait voulu davantage subtil. « Mal. J'ai des nausées et des crampes qui seraient plus faciles à supporter si j'avais un minimum de support de la part de Thomas. Il ne veut pas d'enfant et il me le fait assez bien comprendre. » ronchonna la styliste en fronçant les sourcils et le nez, la tête haute. « Mais aujourd'hui, on oublie ça et on s'amuse. » Si sa relation avec Thomas pouvait s'avérer normale pour la majorité des gens, Amanda semblait en comprendre la complexité puisque Valentina lui avait déjà dit qu'ils se disputaient souvent sur des sujets pourtant sans grande importance, que Thomas semblait bien plus préoccupé par sa vie professionnelle que par sa vie de couple et qu'elle avait souvent du mal à gérer ses états d'âme. Bien sûr, Amanda ne savait pas tout et l'italienne ne lui avait pas révélé qu'elle n'était avec Thomas que pour faire plaisir à leurs familles respectives, qu'elle ne l'aimait pas vraiment, en réalité.

« On fera toutes les boutiques qu'il faut pour trouver notre bonheur ! Qu'est-ce que tu en dis ? » ajouta Valentina en sortant sa carte de crédit pour la passer en riant devant les yeux d'Amanda. Val' était bien connue pour dépenser sans trop compter, mais lorsqu'on possédait un compte en banque aussi fourni que le sien - et surtout à son âge - il n'y avait pas vraiment de problème à profiter un peu de ce que la vie new-yorkaise avait à offrir. Les vendeuses la connaissaient, s'assuraient de la servir avec élégance, accouraient au moindre de ses caprices, persuadées que l'italienne allait quitter la boutique avec des sacs qui valaient bien quelques centaines de dollars, voire même davantage. Elle sourit à l'ancienne danseuse avant de replacer son sac à main sur son épaule et de jeter un coup d'oeil à ce qui se trouvait autour d'elle. Évidemment, Valentina connaissait les boutiques plus ou moins par coeur, mais elle réfléchissait un peu à ce qui pourrait faire plaisir à son amie. Elle détailla rapidement son style vestimentaire, fit la moue en se rappelant que la jeune femme portait presqu'exclusivement du noir.

« Puisqu'on est là, autant se gâter un peu. »

Elle haussa les sourcils, amusée, avant d'entraîner la brune dans la boutique Gucci. Elle jeta un coup d'oeil autour d'elle afin de repérer les vendeuses déjà toutes occupées avec des clients. « Tu peux essayer ce que tu veux, je te l'offre. » La jeune femme retira ses lunettes de soleil, qu'elle laissa sur le haut de sa tête, avant de fouiller un peu la boutique à la recherche de la perle rare. Mille cinq cent dollars, mille deux cent, deux mille ... « Comment ça se passe pour toi, au travail ? » demanda-t-elle en retrouvant son amie, non loin d'elle.

Valentina hocha la tête lorsque son amie accepta de parcourir les boutiques avec elle afin de se changer les idées, bien décidée à passer une très belle journée malgré tout. Si la relation qu'elle entretenait avec Thomas était complexe, la jeune femme n'était pas encore prête à dévoiler à quiconque qu'ils n'étaient ensemble que par intérêt financier ou professionnel et non pas par amour. Le problème, toutefois, c'était que la jeune femme s'attachait tout de même à son fiancé malgré son caractère d'adolescent pourri gâté, mais que la réciproque ne semblait pas être aussi vraie. L'italienne était persuadée qu'ils pourraient avoir une belle vie, tous les deux, qu'ils pourraient même apprendre à s'aimer au fil du temps, mais visiblement, Thomas ne serait jamais de cet avis. Ça lui fendait le coeur d'imaginer que son enfant allait naître au sein de ces conditions familiales un peu précaires, mais puisqu'elle avait accepté la situation en se fiançant à Thomas, elle ne pouvait pas vraiment se plaindre des répercussions engendrées sur leur vie de famille.

Elle sourit à la brune et l'entraîna à sa suite, heureuse de voir qu'Amanda semblait au moins jouer le jeu. Même si l'italienne n'était pas certaine d'être capable d'oublier les soucis qui la préoccupaient depuis quelques mois en parcourant des boutiques, elle s'était promis d'essayer et elle comptait bien acheter un nouvel ensemble de lingerie afin d'allumer son homme. Valentina fit la moue lorsqu'Amanda lui dit qu'elle ne paierait pas pour elle, leva les yeux au ciel à la remarque de son amie, visiblement amusée.

« La qualité et l'originalité n'ont pas de prix. » ajouta-t-elle avec un petit sourire avant d'observer une jupe haute moulante bleu électrique. « De toute façon, c'est impoli de refuser un cadeau. » la taquina-t-elle avec un délicat coup de coude.

« Tu quoi ? » demanda-t-elle, un peu distraite par la robe excessivement sexy qu'elle venait de déposer sur son bras et qui coûtait sans doute une petite fortune. L'italienne ne savait pas trop combien de temps encore elle pourrait la porter avant de ne plus être en mesure de refermer la fermeture éclair, mais elle comptait bien profiter de ces prochaines semaines pour mettre exactement ce dont elle avait envie, montrant ainsi au monde entier qu'une future maman pouvait elle aussi être séduisante et sexy à la fois. Lorsqu'elle posa les yeux sur la pièce de tissu que la brune lui montrait, Val' poussa un soupir avant de toucher l'étoffe du bout des doigts. « Tu sais quoi ? Avec la couleur de tes yeux, le bleu t'irait à merveille. Tu devrais essayer la jupe. » Elle la récupéra et la posa devant Amanda afin de jauger son choix. « En plus, avec le haut que tu as choisi, ce serait parfait. Tu n'aurais qu'à le faire bouffer un peu à la taille, je suis persuadée que ça t'irait comme un gant. En tout cas, tu n'as pas le choix d'essayer et de me montrer. » Elle lui tendit la jupe, mutine, avant de jeter un nouveau coup d'oeil aux vêtements qui se trouvaient devant elle.

« Ta routine ne doit clairement pas ressembler à la mienne. Raconte-moi ! » ajouta-t-elle, enjouée, avant d'attirer l'attention de la vendeuse pour lui laisser les vêtements qu'elles avaient choisis afin qu'elle les dépose dans une cabine d'essayage, un peu énervée qu'on ne le lui ait pas proposé avant.