Ainé d'une fratrie composée de trois gamins, Bart aurait longtemps pu se vanter d’avoir vécu une enfance heureuse et sans encombre. Sa mère, serveuse dans le restaurant tenu de main de maître par son père, aimait et couvait sa progéniture comme un poule. Quant à son papa, il était réputé pour ses talents de cuisinier, sa bonté et sa bienveillance. C’était le genre d’homme qui, d’un point de vue extérieur, semblait aussi solide qu’un roc. Et pourtant, quand un incendie dévasta le travail de toute sa vie, tout reconstruire lui parut au-dessus de ses forces. Prendre soin de sa famille était insurmontable. Alors, il prit la fuite, surprenant ses proches, ses enfants et son épouse. Il fugua le foyer sans demander son reste et sans autres explications qu’un post-it griffonné d’une écriture tremblante qu’on retrouva collé négligemment sur la porte du frigo. Pour Bartolomeo, ce n’était pas seulement son monde qui s’écroulait, c’était la fin d’un bonheur sans faille et sans artifice. Il fut propulsé au rang de chef de famille sans l’avoir ambitionné, car sa mère, ne supportant pas ce célibat précoce et indigne de son mariage, sombra dans une profonde dépression. Elle tenta de la soigner par l’alcool, empirant la situation et Bart, conscient qu’elle n’avait plus rien du repère solide qu’elle avait été, comprit rapidement que, s’il voulait offrit à son frère et à sa sœur l’avenir qu’ils étaient en droit d’attendre, son adolescence devrait être sacrifiée. Il assuma son rôle aussi bien qu’il le put, mais pas sans conséquence. Dès qu’il bénéficiait d’un minimum de liberté, Bart accumulait les conneries pour se sentir exister, si bien qu’un soir, imbibé de whisky, il se rendit coupable d’un accident de voiture qui couta ses jambes à son meilleur ami. De cette catastrophe découla une peine légère dans une prison pour mineur. Rien d’alarmant, mais il en sortit définitivement changer. Prendre ses responsabilités devint une exigence pour lui. Il travailla donc très dur pour obtenir un diplôme qui lui ouvrirait les portes vers l’aisance financière et pas seulement pour lui, mais pour tous ces gens qu’il blessa malgré lui : sa mère, son frère, sa sœur et celle de l’éclopé qui finit par se suicider. C’est à l’université qu’il rencontra celle qui partage aujourd’hui sa vie. Jeune fille de bonne famille, son beau-père le catapulta à la tête d’une de ses innombrables sociétés. Il travaille d’arrache-pied pour être à la hauteur de l’honneur qu’on lui fit. Il réussit, mais n’est pas heureux pour autant. Il se sent prit au piège d’une relation où les sentiments, mélangés à la reconnaissance, sont de plus en plus difficile à distinguer.