“ Tu es sûre que tu veux faire cela ? Tu ne regretteras pas ta vie ici ? ” La jeune fille levait les yeux au ciel, ses valises à côté d'elle, ses lunettes de soleil sur le nez. Elle n'avait qu'une hâte c'était de partir loin de la grisaille de Sheffield et de se retrouver dans l'avion pour enfin entamer sa vie d'adulte. Sa vie loin de ses parents qui la couvent un peu trop. Elle les aime du plus profond de son coeur, mais elle a juste la triste impression d'étouffer dans sa maison, la où tout est beau, tout est vert. Non, elle, la fille de la campagne, elle avait envie de devenir la fille de la ville. Le genre de fille qui, un verre de Starbucks à la main, verrait la ville s'éloignait au fur et à mesure que le métro s'éloignerait. Elle rêvait de buildings, des américains, de l'université américaine. Et elle avait eu cela, grâce à son QI, elle avait réussi à être acceptée à NYU, cette université dont elle vantait les mérites à ses parents depuis son entrée en seconde. Elle avait réussi, elle avait obtenu la lettre et elle n'avait pas besoin de se soucier du logement, puisqu'elle avait réussi à être acceptée comme jeune fille au pair dans une famille de New-York. Tout semblait lui sourire, la vie semblait lui être servie sur un plateau d'argent, mais ce qu'elle ne sait pas, c'est qu'il ne faut jamais se fier aux apparences, la roue peut vite tourner et ne pas prendre en compte le bonheur des autres. Mais ça, Darcy le comprendra bien assez vite.
“Bienvenue à New York, ma douce ! Je suis Aloysia Hemingway, Voici mon mari Daniel et mon fils : Caleb. Nous sommes ta famille durant les deux années à venir à partir d'aujourd'hui. J'espère que tu as fait un bon voyage. Tu as besoin de quelque chose ? A boire ? A manger ? ” Darcy regardait la jeune femme qui lui parlait en hochant négativement la tête. Non tout ce qu'elle voulait c'était dormir, tandis que le petit garçon âgé de quatre ans venait se blottir dans les jambes de la jeune fille “Je t'aime déjà Darssy” La jeune fille riait doucement en s'abaissant au niveau du petit blondinet et elle le reprenait “Je m'appelle Darcy, pas Darssy mon coeur, mais ce n'est pas grave !”
Et elle le prenait dans ses bras comme il le réclamait, Monsieur Hemingway prenant les valises de la jeune fille, et ils se dirigeaient comme une famille jusque la villa des Hemingway. Les yeux pétillants, elle regardait l'endroit, elle qui voulait vivre la vie américaine, elle savait qu'elle allait la vivre, ici dans cette famille.
20 ans: Leeds,le licenciement, barmaid.
“Dégage de ma maison, sombre petite merde” Darcy dévisageait Madame Hemingway qui était rouge de colère et qui avait des larmes de rage qui coulaient le long de ses joues, elle ne comprenait pas tout ce qu'il se passait à ce moment précis mais elle ne voulait pas savoir non plus. Heureusement pour elle, elle avait réussi à être hébergé par une amie qui était dans le même cursus de psychologie qu'elle, après avoir empaqueté ses affaires elle fixait sa patronne : “ Est-ce que je peux savoir pourquoi Aloysia ? Je ne comprend pas vraiment.” Madame Hemingway s'approchait d'un pas rapide jusque Darcy, le doigt levé et elle pointait l'épaule de la jeune fille “Pourquoi ? Tu es sûre ? Tu as couché avec mon mari sombre traînée ! Sous mon toit ! Et peut-être sur mon lit, dans mes draps ! ” Darcy ne comprenait vraiment pas ce qu'il lui arrivait, non, elle n'avait pas couché avec son mari, mais elle n'espérait pas se défendre, de toutes façons, elle ne pouvait pas se défendre, elle ne la croyait pas. Et ça la rendait triste. Tellement triste. Mais elle assumait ce qu'elle n'avait pas fait. Tant pis, elle trouverait un emploi ailleurs, elle avait acquis assez de maturité pour travailler ailleurs. Loin de cette famille. Attrapant son dernier carton, elle se dirigeait jusque la voiture de son amie et ne prenait pas la peine de se retourner. Elle savait que personne n'était en train de la regarder, ou si, elle savait que Madame Hemingway était en train de la fusiller du regard et elle ne voulait pas voir de la haune, dans les yeux de son ancienne patronne. Non, elle ne le supporterait pas.
“ Une bière s'il vous plaît ” Darcy regardait le jeune homme accoudait au comptoir comme si cela faisait plusieurs fois qu'il venait, mais elle était sûre de ne l'avoir jamais vu. Elle ne se souciait pas trop de cet homme, il n'avait pas la tête d'un alcoolique comme elle avait l'habitude de voir fréquenter ce bar miteux. Les piliers de bar comme Grieshka, sa patronne les appelle. Non, lui on pourrait croire qu'il est novice dans la catégorie tournée des bars, comme si, il était la, pour la première fois mais qu'il s’acclimatait si bien à l'endroit qu'on avait la nette impression qu'il avait fait cela toute sa vie “Et voici votre bière, trois dollars s'il vous plaît” Le jeune la regardait du coin de l'oeil en souriant, tout en fouillant dans son porte-feuille d'où il sortait un billet de 10 dollars. “Gardez la différence” Darcy souriait, un sourire franc, sincère, c'était bien la première fois qu'un client lui donnait un pourboire si important. “Oh merci ! Passez une bonne soirée !” “You too !” Et elle s'affairait à servir tout les clients, gardant un oeil sur le brun qui se trouvait à quelques mètres seulement d'elle. Elle était tellement absorbée par ce que faisait le jeune homme qu'elle percutait sa collègue et se renversait la pinte de bière qu'elle devait servir à un client. Se confondant en excuses, elle se retirait dans la salle des employés se maudissant intérieurement d'avoir renversé la bière de l'un de ses plus importants clients et aussi d'être passée pour la fille la plus maladroite de la terre auprès de cet homme. Lorsqu'elle retournait derrière le comptoir, elle s’apercevait tristement qu'il n'était plus là, et elle se demandait bien ce qu'elle s'était imaginée dans son esprit étriqué. Elle n'était qu'une pauvre barmaid qui servait des bières à des alcooliques, et lui,il était un client. Rien de plus. Fin de l'histoire. Lorsqu'elle ramassait le verre vide de son client anonyme, elle fronçait les sourcils en observant une flèche épaisse et noire sur le dessous de verre en carton. Fronçant les sourcils, elle regardait derrière et s'aperçevait qu'il y avait laissé son numéro et qu'il avait écrit en lettres majuscules “Pour la maladroite, derrière le comptoir”. Elle enfonçait le petit carton dans sa poche, se promettant de ne pas le rappeler aujourd'hui, demain, mais dans trois jours. Pour qu'il n'aille pas s'imaginer que tout était acquis d'avance.
Huit mois après : “Leeds, je pense que nous avons fait une bêtise, je suis enceinte...” Darcy, 20 ans, barmaid et étudiante en psychologie, le test de grossesse positif dans les mains, observait de manière incrédule son petit ami qui était dans leur lit, dans leur petit appartement. Fermant les yeux, elle se passait une main dans les cheveux tandis que son petit ami venait tendrement se blottir contre elle après avoir déposé des baisers dans son cou. “Mais c'est bien mon amour ! Tu vas être une maman formidable, et nous allons former une famille extraordinaire” Les mains tremblantes, Darcy se retournait, et prenait doucement Leeds dans ses bras. “Et j'ai une question à te poser, nous allons avoir un bébé, une famille. Je veux deux ou trois enfants qui te ressemblent et qui me ressemblent, mais surtout, je veux t'épouser... Darcy, veux-tu être ma femme ?” Darcy écarquillait les yeux à la vue de cette bague qui semblait coûter un bras et d'une voix tremblante elle répondait “Je... Je le veux.” Les larmes perlaient sur le coin de ses yeux et tandis que Leeds lui passait sa bague de fiançailles au doigt, elle se reculait et partait en courant pour aller dans les toilettes, nauséeuse. “JE T'AIME LEEDS MAIS SI TU SAVAIS COMME JE TE DETESTE” Les nausées matinales, elles, elle ne les avaient définitivement pas prit en compte.
23 ans : l'accident
“C'est partiiii En route pour Phoenix, mais avant, petit arrêt à Washington, et direction l'aéroport ! ” Darcy ayant difficilement du mal à se déplacer tant son ventre avait grossi se contentait de sourire à Leeds qui avait l'air autant excité qu'un enfant de cinq ans. Elle avait hâte aussi de rencontrer sa famille, même si elle avait l'impression de s'imposer. Elle avait aussi cette lettre de sa mère qui l'attendait dans son sac, elle ne savait pas pourquoi elle lui avait écrit, mais elle l'avait fait. Leeds, une main sur la cuisse de sa fiancée, la caressait tendrement “Ouvre la, je sais que tu en meurs d'envie” Elle savait qu'il fallait qu'ils fassent des emplettes, des courses pour le voyage même si elle savait qu'ils allaient forcément devoir payer un supplément pour l'avion, elle s'en fichait après tout, elle était heureuse d'être ici. Et pour la première fois de sa vie, elle se sentait à sa place dans sa vie, comme si Leeds l'avait remis sur le droit chemin au lieu d'affronter la piste sinueuse de sa vie d'avant. Désormais, elle n'était plus barmaid, mais bouquiniste. Elle avait trouvé un petit job qui lui permettait de ne pas se coucher à des heures incongrues. Ouvrant la petite enveloppe écrite à l'encre noire, elle laissait ses yeux se baladait sur le papier.
- Citation :
- “Mon amour, ma petite fille,
Si je t'écris cette lettre aujourd'hui, c'est pour te féliciter de cette grossesse qui te sied à merveille. Je suis très heureuse que tu aies trouvé quelqu'un d'aussi bien que Leeds. Et j'ai hâte de voir mon petit fils, ou ma petite fille. Je voulais aussi t'avouer quelque chose. Il y a vingt et un an, le médecin m'avait fait cet aveu terrible, je ne pouvais pas avoir d'enfants. Mais quelques mois plus tard, je suis tombée enceinte. De deux enfants, des jumeaux, ou plutôt des jumelles. Lors de mon voyage à New York, vous, toi et ta soeur, avaient décidés de pointer le bout de votre nez. Mais, ayant des difficultés financières, nous avons choisi de te garder toi et de placer ta sœur dans un orphelinat. Je suis désolée.
Je t'aime.
Maman.”
“Leeds, fais demi-tour. Maintenant.” Leeds la dévisageait du coin de l'oeil “Bébé, je ne peux pas. De une, à cause du trafic et ensuite, parce que nous avons notre vol dans 1h30.” Darcy serrait dans ses mains la lettre de sa mère et éprouvait le besoin intense de faire une session Skype avec elle. “FAIS DEMI TOUR, LEEDS, POUR L'AMOUR DE DIEU.” Et la, elle eut un geste totalement désespéré, qu'elle ne contrôlait pas, elle prenait le contrôle du volant et donner un coup sec de façon à ce que la voiture soit déviée sur l'autre voix, mais, elle n'avait pas vu le camion qui arrivait. “PUTAIN DARCY, JE T'AI DIT QUE JE...” Et puis plus rien, le noir, le vide. La seule chose qu'elle entendait c'était un cri puissant et le bruit du klaxon. Lorsqu'elle ouvrait les yeux, elle entendait le bruit des sirènes et sa tête bourdonnait, comme si, un terrible mal de tête venait de s'éveiller dans sa boîte crânienne. “Mademoiselle ? Mademoiselle ? Vous m'entendez ? ” Elle ouvrait difficilement les yeux qu'elle clignait, elle n'arrivait pas à tourner la tête. Elle était comme paralysée, et elle se rendait compte qu'elle était immobilisée “O..Oui, je vous entend.” Le pompier qui se tenait au dessus d'elle, lui montrait sa main, lui faisait compter ses doigts “Combien ?” “Cinq, je crois. Où est Leeds ? Et mon bébé ? Sauvez le, je vous en supplie, sauvez les. Je m'en fiche de vivre, je veux juste qu'ils soient heureux et en vie, s'il vous plaît, sauvez les” Et elle fermait les yeux, la douleur insupportable qui venait de prendre part de sa tête la clouait au sol, l'empêchait de réfléchir. Lorsqu'un énorme bruit se fit entendre, elle hurlait. Un cri perçant la nuit noire, un cri lui rappelant à quel point elle avait pu être idiote. Idiote d'avoir forcé Leed à faire demi-tour. Ce que la jeune Barkley ne savait pas, c'est qu'en dépit de vouloir former une famille avec celui qu'elle aimait, elle venait de la tuer, elle venait de tuer les deux seules personnes, enfin, la seule personne qui comptait pour elle, et son enfant. Elle avait tué ses perspectives d'avenir et la vie avait décidé de lui retirer tout ce qu'elle avait, c'est à dire, le bonheur de se retrouver le matin avec une personne qu'elle aime à ses côtés. Elle venait de tuer son bonheur à coup de couteau, elle venait d'engager, sa longue descente en enfer.
“Où est Leeds ? Il est en vie ? Et mon bébé ? Dites moi qu'il est en vie, je sais qu'il n'est plus dans mon ventre, je le sais, je le sens.” Darcy, une main sur son ventre, perfusée comme il n'était pas plus possible de l'être regardé le médecin, les traits tirés, les cernes marquées. Elle attendait une réponse de sa part, un seul mot. Une réponse positive, mais au fur et à mesure que les secondes passaient comme les tics tacs d'une montre qui sonnaient dans sa tête, elle savait que ce n'était pas bon signe. Qu'elle avait trop espéré. “Je suis désolée mademoiselle Barkley, mais votre fiancé n'a pas survécu... Concernant votre enfant... Et bien, il n'a pas survécu non plus... Je suis désolé. Toutes mes condoléances.” Un nouveau cri perçant brisait le silence mortuaire de la chambre d'hôpital “Sortez.” Le médecin la fixait, incrédule, ne comprenant pas vraiment, et il restait là, sans bouger, sans rien dire. “SORTEZ, PUTAIN, SORTEZ. LAISSEZ MOI ÊTRE SEULE, LAISSEZ MOI MOURIR. LAISSEZ MOI REJOINDRE MON FIANCE, MON FILS.” Et elle pleurait, des torrents de larmes déferlaient sur ses joues blanchies par ses nuits d'hôpital. Le médecin appelait alors une infirmière et elle se débattait quand elle sentait l'infirmière qui voulait lui injecter un calmant. Non, elle ne voulait pas être calmée, elle voulait juste mourir. Et elle essaiera, une fois, deux fois. Elle essaiera sans succès. Et c'est à ce moment précis qu'elle comprendra que la vie n'est qu'une garce, et qu'au moins de son accident, sa garce de vie s'était mise à danser devant ses yeux et qu'elle avait juste à subir. Subir tristement, le sort que lui avait balancé le karma en pleine figure.
25 ans : la rencontre avec Jack
Tel un fantôme, elle errait dans l'université, cherchant à trouver de quoi apaiser les crises d'angoisses qui semblait avoir prit une part entière de son organisme. Lorsqu'elle se rendait compte qu'elle ne trouverait pas son bonheur ici, ses écouteurs dans les oreilles, elle avançait pour se retrouver dans les bas quartiers de New-York, là où tout les dealers se retrouvaient, la où elle pouvait se procurer de quoi profiter de la vie. Avançant d'une démarche assurée, elle ne se rendait pas compte que l'enthousiasme qui venait de prendre possession de son corps était remarqué par cet homme qui la regardait de temps à autre à travers l'écran de son téléphone. Elle ne le voyait pas non plus qui s'arrêtait et lorsqu'elle le percutait, elle faisait tomber son sac, et tout le contenu qu'il contenait. De son téléphone à son porte-feuille, en passant par son tampon et ses clés de studio “Je suis désolée laissez moi vous aider. Et lorsque le jeune homme s'abaissait pour ramasser son téléphone et son porte-feuille, elle s'empressait de ramasser tout les objets un peu honteux qui se trouvait dans son sac à main, prise alors d'une énorme gêne. Elle ne sentait pas très bien, et se rendait compte qu'elle n'avait pas pris ses cachets ce matin. C'était peut-être pour cela qu'elle sentait une crise qui lui tordait le coeur “Je suis Jack.” Fronçant les sourcils, elle se demandait si elle devait répondre. Est-ce que cela en valait la peine pour elle, la dépressive, le fantôme, la suicidaire ? Peut-être pas. “Enchantée, je suis Darcy.” Et il lui souriait “Enchanté Darcy, mais vous devriez faire plus attention où vous mettez les pieds la prochaine fois” Et elle riait doucement. “Vous avez laissé tomber votre téléphone, tenez.” Et elle lui tendait son téléphone, sans savoir qu'elle venait de l'échanger malencontreusement avec le sien, laissant sa vie dans les mains d'un inconnu. Toutes les photos qu'elle avait de Leeds, les photos de ses échographies, de la chambre du bébé qu'ils avaient commencés à peindre. Et lorsqu'elle le voyait s'engouffrer dans la bouche de métro, il était trop tard. Elle soupirait alors, se promettant de s'auto-appeler quand elle aurait fait la fermeture de la bouquinerie. Mais, ce qu'elle ne savait pas, c'était que peut-être, cet homme était celui qui allait lui sauver la vie, la sauver de la morosité de son quotidien et lui rendre la vie un peu plus belle. Comme si c'était l'ange que Leeds venait de lui envoyer du ciel.